Obésité : une souffrance souvent sous-éstimée
« On parle beaucoup de l’aspect physique, mais personne ne parle des conséquences psychologiques de surpoids. L’estime de soi, la dépression, la honte… c’est un poids que j’aimerais pouvoir déposer »
Ces paroles reflètent les besoins fondamentaux d’acceptation, de soutien et d’accès à des soins adaptés exprimés par beaucoup de personnes en situation d’obésité.
L’obésité s’inscrit dans une trajectoire de vie, souvent marquée par des facteurs psychologiques, sociaux et métaboliques profonds.
Vous n’êtes pas seul
En Suisse, d’après une dernière enquête pour la santé, presque 1 adulte sur 2 est en situation de surpoids ou d’obésité (42% des personnes âgées de plus de 15 ans).
Obésité : de quoi parle-t-on ?
Qu’est-ce que l’obésité ?
L’obésité est une maladie chronique et complexe qui ne se résume pas à un simple excès de poids. Elle résulte de nombreux facteurs combinés, à la fois biologiques, psychologiques, environnementaux et sociaux.
Souvent vécue comme un véritable fardeau, l’obésité impacte non seulement la santé physique, mais aussi le bien-être émotionnel et la vie sociale. Elle peut être influencée par des éléments tels que le stress, la santé mentale, les conditions de vie, certains traitements médicaux, des prédispositions génétiques ou des déséquilibres hormonaux.
Parce qu’elle est multifactorielle, l’obésité nécessite une approche globale et individualisée. C’est une maladie à long terme, avec un risque de rechute et de complications, qui demande un accompagnement adapté et bienveillant.
Comment calculer le degré d’obésité ?
Le calcul de l’indice de masse corporelle (IMC) permet d’estimer la classe de sévérité de la maladie. Pour calculer cet indice, il faut diviser votre poids en kilogrammes par la taille en mètre et au carré. Par exemple, si votre poids est de 95 kg et votre taille 1.72 m, votre IMC sera le suivant :
ce qui correspond à l’obésité classe I (car l’IMC est supérieure à 30 kg/m2), tableau ci-dessous.
Voici les différentes classes de l’obésité selon l’IMC valables pour la population européenne:
Il est à noter que l’IMC n’est qu’un indicateur très imprécis qui ne reflète pas la composition corporelle, comme le pourcentage de muscles. A ce jour, nous n’avons malheureusement pas d’autre moyen de définir l’obésité.
Une autre mesure qui permet d’évaluer votre risque cardio-vasculaire de l’obésité est le tour de taille (la circonférence ou le périmètre abdominal).
Le tour de taille peut être considéré comme un bon index de la composition corporelle et notamment de la quantité de graisse viscérale, celle qui est localisée à l’intérieur de la cavité abdominale.
Voici les valeurs de la tour de taille pour évaluer les risques d’obésité chez les européens :
Le rapport entre le tour de taille et la taille elle-même présente également un complément d’information qui permet situer le risque éventuel lié à l’excès pondéral.
est considéré à risque s’il est supérieur à 0.50.
BMI calculator
Your BMI is......
BMI | Classification |
---|---|
less than 18.5: |
Underweight |
18.5 - 24.9: | Normal weight |
25 - 29.9: | Overweight |
30 - 34.9: | Class I Obese |
35 - 39.9: | Class II Obese |
40 upwards: | Class III Obese |
Lutter contre la stigmatisation liée à l’obésité
Pendant longtemps, certaines idées reçues ont conduit à des jugements injustes envers les personnes vivant avec l’obésité. Il est encore trop fréquent d’entendre que le surpoids serait simplement dû à un manque de volonté, à de la paresse, ou qu’il suffirait de « manger moins et bouger plus » pour régler le problème.
Ces propos, souvent prononcés même dans le milieu médical, sont non seulement inexacts, mais profondément blessants. Ils ignorent la complexité de cette maladie chronique et les efforts constants que déploient de nombreuses personnes pour gérer leur poids.
La stigmatisation liée à l’obésité peut avoir des conséquences graves. Elle renforce le sentiment d’échec, alimente la détresse psychologique, et peut déclencher ou aggraver des comportements alimentaires compulsifs. Ce cercle vicieux nuit à la santé globale et freine la prise en charge.
Il est essentiel de promouvoir une approche respectueuse, fondée sur la bienveillance, l’écoute et la compréhension. La lutte contre l’obésité passe aussi par la lutte contre les préjugés.
Pourquoi envisager une perte de poids ?
Perdre du poids ne doit jamais être dicté par les pressions sociales, les jugements extérieurs ou les attentes d’un entourage. La santé ne se résume pas à une apparence, et chaque personne mérite respect et dignité, quel que soit son poids.
La démarche de perte de poids doit avant tout être personnelle, motivée par le désir de mieux-être, d’améliorer sa qualité de vie et de préserver sa santé. Il ne s’agit pas de répondre à des standards irréalistes, mais de prendre soin de soi.
Bonne nouvelle : il n’est pas nécessaire de perdre beaucoup de poids pour en tirer de réels bénéfices. Une perte même modeste – comme 5-10 kilos – peut avoir un impact significatif sur la santé. Chez les personnes atteintes de diabète de type 2, par exemple, cela peut aider à mieux contrôler la glycémie, voire à atteindre une rémission de la maladie. Avec mon équipe aux HUG, nous avons d’ailleurs démontré que perdre du poids au début du diabète peut conduire à une régression durable, parfois sans traitement médicamenteux.
Une perte de poids modérée peut également améliorer d’autres aspects de la santé : réduction du cholestérol, baisse de la tension artérielle, soulagement des douleurs articulaires… Dans certains cas, cela permet même de réduire ou d’arrêter certains médicaments devenus inutiles.
Enfin, perdre du poids peut aussi contribuer à diminuer le risque de développer certaines formes de cancer, l’obésité étant reconnue comme un facteur de risque pour plusieurs maladies oncologiques.
Bénéfices de perte de poids sur la santé
% de poids perdu |
Bénéfices sur la santé |
5 % |
Amélioration du taux de sucre dans le sang (diabète de type 2) Réduction de la pression artérielle Moins de douleurs articulaires (arthrose) et amélioration de la mobilité Amélioration du taux de cholestérol |
10 % |
Réduction significative du risque de diabète de type 2 Diminution du risque d’apnée obstructive du sommeil Amélioration plus marquée des marqueurs cardiovasculaires Soulagement des douleurs chroniques |
15 % |
Rémission possible du diabète de type 2 Amélioration de la fonction hépatique Diminution plus importante des traitements médicamenteux Amélioration de la fertilité et du cycle menstruel |
>15 % |
Réduction des risques cardiovasculaires majeurs Rémission durable du diabète de type 2 (sans médicaments) Diminution du risque de certains cancers Réduction significative de la graisse hépatique (MAFLD) |
Il est important de souligner que plus la perte de poids est significative, plus les améliorations sur les maladies associées sont marquées, augmentant ainsi les chances de rémission. Toutefois, le facteur clé reste le maintien de ce poids sur le long terme, après la phase de perte initiale.
Perdre du poids durablement : est-ce vraiment possible ?
Vous vous demandez comment perdre du poids sur le long terme, sans effet yo-yo ? Et surtout, s’il est possible de ne pas en reprendre après l’avoir perdu ?
La réponse est oui : une perte de poids durable est tout à fait possible. Mais elle ne repose ni sur des régimes stricts ni sur le sport.
La clé réside dans un accompagnement personnalisé et bienveillant. Il est essentiel de sortir des approches culpabilisantes et stigmatisantes pour aborder l’obésité de façon globale, humaine et professionnelle. Un véritable changement durable demande bien plus qu’un simple programme alimentaire. Il implique de comprendre et de traiter les causes profondes de la prise de poids : biologiques, psychologiques, comportementales ou encore sociales.
Comme beaucoup de personnes que j’accompagne, vous avez sans doute déjà tenté plusieurs régimes, modifié votre alimentation ou intensifié votre activité physique. Vous avez peut-être perdu du poids, parfois même beaucoup… avant d’en reprendre une grande partie. Ce schéma est fréquent, et il ne reflète pas un manque de volonté – mais plutôt les limites des approches traditionnelles.
Pour obtenir des résultats durables, il faut des solutions sur mesure, adaptées à votre parcours et à votre réalité. C’est cette approche globale et individualisée qui permet de retrouver un équilibre de vie, une perte de poids stable, et surtout de ne plus revivre les reprises systématiques.
Vous pensez qu’il est impossible de perdre du poids sans le reprendre ? Dans notre livre publié aux éditions Vigot, Maigrir durablement, c’est possible. Approches scientifiques et psychologiques de l’obésité, mon collègue et moi vous dévoilons des stratégies concrètes, validées par la science et la psychologie, pour retrouver un poids stable et améliorer durablement votre qualité de vie.
Pourquoi les régimes ne permettent pas une perte de poids durable ?
Vous vous êtes peut-être déjà demandé : « Pourquoi le régime ne fonctionne pas chez moi ? ». Pourtant, à première vue, tout semble bien se passer : vous suivez les règles, vous pesez vos aliments, vous comptez les calories… et la balance vous le rend bien. Le poids diminue, parfois rapidement, surtout si le régime est strict.
Mais au bout d’un certain temps, la perte de poids ralentit, puis s’arrête. Et très souvent, les kilos finissent par revenir – parfois même en plus grand nombre. Pourquoi ? Parce qu’aucun régime restrictif n’est viable à long terme.
Avec le temps, les restrictions alimentaires deviennent de plus en plus difficiles à supporter. Les aliments que vous vous interdisez finissent par vous manquer – psychologiquement, parce qu’ils sont associés au plaisir, et physiologiquement, parce que votre corps a besoin d’un apport équilibré et suffisant pour fonctionner normalement.
Face à cette privation, votre organisme active des mécanismes de survie : il perçoit la restriction comme une menace et cherche à reconstituer les réserves perdues. C’est à ce moment-là que le poids commence à remonter, parfois malgré des efforts constants.
La réalité, c’est que la perte de poids durable ne se résume pas à manger moins. Elle nécessite une approche globale, personnalisée, qui respecte le fonctionnement de votre corps et s’inscrit dans une transformation progressive du mode de vie, sans frustration ni culpabilité.

Figure : Les mécanismes biologiques entraînant la reprise de poids après un régime alimentaire
(adapté selon Sumithran P, Proietto J. Clin Sci 2013;124(4):231–41)
L’obésité nécessite une approche spécialisée et personnalisée
Rappelez-vous que l’obésité dont vous souffrez est une maladie chronique qui nécessite un traitement au-delà des conseils alimentaires. Il est de loin pas suffisant de « manger mieux et bouger plus », comme beaucoup de médecins ou d’autres soignants le conseillent malheureusement souvent. Si c’était si simple, vous ne seriez probablement plus concerné et vous ne chercheriez pas l’aide d’un spécialiste de l’obésité.
Ce que je souhaite vous transmettre, c’est un message d’espoir : oui, il est possible de perdre du poids durablement. Mais cela passe par une compréhension en profondeur des causes de votre prise de poids, un accompagnement professionnel adapté à votre parcours, et la mise en place d’outils concrets pour transformer votre relation à l’alimentation, à votre corps, et à votre santé.
Quelques prérequis pour une perte de poids durable
Pour réussir durablement sa perte du poids, le premier pas est se défocaliser de votre poids et du chiffre affiché sur votre pèse-personne. Dans la plupart des situations que j’ai vu durant les 30 ans de ma carrière de médecin, il est d’abord nécessaire de
se demander pourquoi vous voulez perdre du poids, quelle est votre motivation pour perdre du poids
quelles sont vos priorités dans la vie actuellement
pourquoi vous n’êtes pas actuellement satisfait de votre poids ou de votre corps
est-ce c’est le bon moment aujourd’hui pour s’investir dans un projet de perte de poids
qui ou qu’est-ce qui vous motive pour perdre du poids
faire un récapitulatif de tous ce que vous avez déjà fait jusqu’ici pour perdre du poids
-
- tous les régimes
- toutes les tentatives de faire de sport
- tous les suivis chez des spécialistes, nutritionnistes, diététiciens, coaches sportifs, etc.
- éventuellement les médicaments voire même la chirurgie dont vous avez déjà pu bénéficier pour maigrir
LA PRISE EN CHARGE DE L’OBÉSITÉ NE DOIT PAS TENIR COMPTE UNIQUEMENT DE VOTRE ALIMENTATION OU DE VOTRE ACTIVITÉ PHYSIQUE ET NE PEUT PAS ÊTRE SIMPLIFIÉE AU SIMPLE FAIT QU’IL A Y UN MÉDICAMENT OU UNE OPÉRATION « MIRACLE ».
Pour traiter l’obésité, les causes sous-jacentes qui y sont responsables et qui sont à l’origine de votre prise de poids doivent être non seulement abordées mais surtout traitées par des spécialistes formés et avec expérience.
Quels traitements envisager ?
Axe 1 : L’aspect émotionnel – Une clé souvent négligée
Cela peut surprendre, mais l’équilibre émotionnel joue un rôle fondamental dans la gestion du poids. Le stress, la fatigue, l’anxiété ou encore certaines émotions comme la colère, la tristesse ou l’ennui peuvent influencer nos comportements alimentaires sans que nous en ayons toujours conscience.
Ce que j’appelle l’alimentation émotionnelle est une réalité pour de nombreuses personnes : on mange non pas parce qu’on a faim, mais pour se réconforter, se calmer ou s’occuper. Avant de modifier ce qu’il y a dans votre assiette, il peut être utile de vous interroger sur ce que vous ressentez, et comment cela influence votre rapport à la nourriture.
Voici quelques questions fréquentes que vous devriez vous poser lorsqu’un déséquilibre émotionnel est en jeu :
- Pourquoi est-ce que je grignote sans avoir faim ?
- Pourquoi ai-je envie de manger quand je suis stressé(e) ou fatigué(e) ?
- Pourquoi est-ce que je ressens le besoin de finir mon assiette, même quand je suis rassasié(e) ?
- Pourquoi une sucrerie me fait-elle du bien lorsque je suis contrarié(e) ou énervé(e) ?
Ces questions sont importantes, car elles vous permettent de mieux comprendre votre comportement alimentaire, et de poser les bases d’un changement durable. Prendre soin de votre bien-être psychologique, c’est aussi prendre soin de votre santé globale.
Un accompagnement par un professionnel formé à ces questions peut vous aider à identifier les déclencheurs émotionnels, à développer d’autres stratégies de gestion du stress, et à construire une relation plus sereine avec la nourriture.
Axe 2 : L’alimentation – Un repère, pas une solution unique
Même si l’alimentation n’est pas toujours la cause principale du surpoids ou de l’obésité, il reste utile et pertinent de faire le point sur ses habitudes alimentaires. Cette étape permet de s’assurer que vos repas sont globalement équilibrés, adaptés à vos besoins réels et à votre mode de vie.
Un réajustement alimentaire peut s’inscrire dans une démarche de soin, sans pour autant être la seule réponse à la perte de poids. En effet, l’alimentation fait partie d’un ensemble de facteurs à considérer (stress, sommeil, émotions, activité physique, etc.).
L’objectif n’est pas de suivre un régime strict, mais d’adopter des habitudes durables, sans frustration, en respectant vos goûts, votre rythme et votre quotidien. Un accompagnement professionnel peut vous aider à y voir plus clair et à faire des choix adaptés, sans jugement.
Axe 3 : L’activité physique – Bouger au quotidien, sans devenir sportif
Contrairement aux idées reçues, il n’est pas nécessaire de devenir un grand sportif pour améliorer sa santé ou favoriser la perte de poids. L’essentiel est de bouger suffisamment chaque jourselon vos capacités.
L’activité physique, c’est d’abord intégrer davantage de mouvement dans votre quotidien :
- Prendre les escaliers au lieu de l’ascenseur, même pour un ou deux étages.
- Préférer la marche pour de petits trajets au lieu de prendre la voiture ou les transports.
- Utiliser le vélo si c’est possible pour vos déplacements.
- Se lever régulièrement si vous travaillez assis longtemps.
Ces gestes simples, accessibles à la majorité des personnes, comptent réellementpour votre santé métabolique, votre bien-être et votre poids. Bien sûr, pratiquer un sport ou aller au fitness peut être bénéfique, mais ce n’est pas indispensable pour commencer. Ce qui importe le plus, c’est la régularité dans le mouvement, pas l’intensité.
N’oubliez pas que l’objectif n’est pas la performance, mais de retrouver le plaisir de bouger à votre rythme, sans pression.
Médicaments et chirurgie pour la perte de poids : des aides, pas des solutions magiques
Les médicaments contre l’obésité
Des médicaments spécifiques peuvent être prescrits pour favoriser la perte de poids. Dans certains cas, ils peuvent être remboursés par l’assurance maladie. Utilisés dans le cadre d’un suivi médical spécialisé, ces traitements peuvent réellement vous aider à mieux réguler votre appétit, à réduire les fringales et à faciliter la mise en place de nouvelles habitudes alimentaires.
Mais il est essentiel de le dire clairement : ces médicaments ne sont pas une solution miracle. Ils ne remplacent ni un accompagnement global ni un travail sur les causes profondes de l’obésité. Leur prescription doit toujours se faire sous la supervision de professionnels de santé formés à la prise en charge de l’obésité, dans le cadre d’une approche complète et personnalisée.
La chirurgie bariatrique
La chirurgie de l’obésité, aussi appelée chirurgie bariatrique, est une option thérapeutique possible dans certaines situations. Les interventions les plus fréquentes sont la sleeve gastrectomie (réduction de la taille de l’estomac) et le bypass gastrique (modification du circuit digestif).
Ces opérations permettent de manger en plus petites quantités, et elles peuvent entraîner une perte de poids significative. Elles sont encadrées médicalement et nécessitent une évaluation rigoureuse, un suivi à long terme, et surtout une préparation sérieuse, tant sur le plan physique que psychologique.
Ce qu’il faut retenir
Il n’existe pas de solution simple, rapide ou magique pour traiter l’obésité.
Ni les régimes, ni les médicaments, ni la chirurgie ne traitent les véritables causes de la prise de poids : stress, émotions, habitudes de vie, environnement, troubles hormonaux, histoire personnelle … .
Les médicaments ou l’opération peuvent soulager les symptômes, notamment le poids, mais ils ne remplacent jamais une approche globale et durable. Car le chiffre sur la balance, aussi important soit-il, n’est que la partie visible de l’iceberg (figure à droite).
Ce qui compte, c’est de comprendre et prendre en charge ce qui se cache en profondeur : vos émotions, vos habitudes, vos difficultés, votre parcours.
Un accompagnement professionnel, respectueux et bienveillant, reste la clé d’un changement durable.
Figure : Le poids n’est que la pointe de l’iceberg, dont les causes profondes ne sont malheureusement traitées ni par les régimes amaigrissants, ni par les médicaments, ni par la chirurgie.
Comment s’y prendre en pratique
Comprendre et agir sur vos envies alimentaires
Il est fondamental d’identifier les déclencheurs de vos envies alimentaires afin de mieux comprendre les habitudes qui influencent votre comportement face à la nourriture.
Posez-vous les bonnes questions :
- À quels moments ai-je du mal à manger de manière équilibrée ?
Est-ce le soir en rentrant du travail ? Après le dîner ? En passant devant une boulangerie ou un kiosque ? - Quelles situations déclenchent mes envies irrépressibles de grignoter ?
Le stress, les soucis, l’anxiété, une dispute, une pression professionnelle ou familiale, un deuil… Ces émotions jouent souvent un rôle central. - Qu’est-ce que je compense à travers l’alimentation ?
La nourriture peut devenir une réponse à des émotions, qu’elles soient négatives (colère, frustration) ou positives (plaisir, excitation).
Pour amorcer un changement durable, il est utile d’apprendre à s’observer sans jugement :
- Être attentif à ses sensations digestives,
- Reconnaître les signaux de faim et de satiété,
- Travailler sur le rythme des repas grâce à l’alimentation en pleine conscience.
Ces prises de conscience sont des étapes clés pour retrouver une relation apaisée avec la nourriture.
Alimentation : quelques conseils pour favoriser une perte de poids durable
Il n’existe pas de consensus unique sur la meilleure manière de s’alimenter pour perdre du poids de façon durable. Ce qui fonctionne pour une personne ne conviendra pas forcément à une autre. C’est pourquoi je ne parle pas de régime alimentaire au sens strict, mais plutôt d’un équilibre alimentaire global, sans interdits ni restrictions rigides.
Comme évoqué précédemment, ce n’est pas un régime ponctuel qui vous permettra d’atteindre et de maintenir votre poids de forme sur le long terme. C’est un travail progressif et individualisé, qui prend en compte vos habitudes, vos préférences et votre mode de vie.
Quelques repères utiles :
Des études ont montré que la régularité des repas joue un rôle important dans la perte de poids durable. Prendre des repas réguliers peut faciliter le processus. Toutefois, il est inutile de vous forcer à manger le matin si vous n’en ressentez pas le besoin : l’écoute de votre corps reste essentielle.
La structure des repas
Votre repas principal de la journée (midi ou soir) devrait s’organiser autour de trois familles d’aliments :
- Féculents (riz, pâtes, pommes de terre, pain complet…)
- Protéines (viande, poisson, œufs, fromage…)
- Légumes (cuits ou crus, sous forme de salade ou de légumes chauds)
Je recommande une répartition simple et visuelle dans l’assiette :
- ½ assiette de légumes,
- ¼ de protéines,
- ¼ de féculents
Figure : La répartition des légumes/salades – protéines – hydrates de carbone dans l’assiette
Il peut être intéressant de commencer son repas par les légumes ou la salade, puis les protéines, et de finir par les féculents. Ainsi, si vous êtes rassasié(e) avant d’avoir tout terminé, vous pourrez ajuster naturellement vos quantités : Si vous n’avez plus faim après avoir consommé les légumes et les protéines, il n’est pas nécessaire de terminer la portion de féculents.
Enfin, l’idéal est de viser trois repas complets et équilibrés par jour, mais cela doit rester souple : selon votre rythme, des collations saines peuvent aussi faire partie de votre équilibre alimentaire.
Faut-il vraiment éviter les féculents pour perdre du poids ?
Non, et voici pourquoi.
Les féculents — aussi appelés hydrates de carbone — regroupent les aliments comme le pain, les pâtes, le riz, les pommes de terre ou encore les aliments à base de farine. Ils jouent un rôle essentiel : ils sont la principale source d’énergie pour notre corps.
Supprimer totalement ou sévèrement les féculents, comme le proposent certains régimes restrictifs, peut avoir des effets contre-productifs :
- Une fatigue importante,
- Une baisse d’énergie,
- Des troubles de l’humeur voire une diminution de la libido.
Pourquoi ? Parce que lorsque vous ne consommez plus de glucides, votre corps puise d’abord dans ses réserves (sucre stocké dans le foie et les muscles). Une fois ces réserves épuisées, il entre dans un état de « vigilance » et ralentit le métabolismepour économiser l’énergie.
Le résultat : après une perte de poids rapide, vous reprenez souvent les kilos perdus… et parfois davantage.
Pourquoi ? Puisque votre corps se souviendra de cette « privation » de calories (carburant) et voudra reconstituer ses stocks d’énergie pour une future période de « famine ».
Et les régimes hyperprotéinés ?
Un régime riche en protéines et pauvre en glucides peut sembler efficace à court terme, mais difficile à maintenir à long terme. Il entraîne souvent des frustrations, et tôt ou tard, le corps et l’esprit finissent par « craquer », avec un retour aux anciens réflexes alimentaires… parfois amplifiés.
Quelques recommandations de base pour une alimentation équilibrée
Consommez 5 portions de fruits et légumes par jour, en variant les couleurs et les saveurs : → Idéalement : 3 portions de légumes + 2 portions de fruits. Attention : il ne s’agit pas de manger 5 fruits par jour.
Exemple : 200 g de fraises, de framboises ou de myrtilles équivalent à une portion, tout comme une pomme, une orange ou une poire.
Et si vous n’avez plus faim, vous n’êtes pas obligé(e) de finir votre assiette. Les restes peuvent tout à fait être conservés pour le prochain repas !
Approches thérapeutiques médicamenteuses et chirurgicales de l’obésité
Les fondements de la prise en charge thérapeutique de l’obésité ont été exposés dans les chapitres précédents.
Pour rappel, cette prise en charge repose avant tout sur une approche globale, individualisée et centrée sur la personne – et non uniquement sur la réduction du poids corporel.
Dans cette section, je vais me concentrer sur les options thérapeutiques complémentaires que sont les traitements médicamenteux et chirurgicaux, qui peuvent, dans certaines situations bien définies, être très utiles dans la prise en charge de l’obésité.
Nouveaux traitements médicamenteux favorisant la perte de poids
De nouveaux médicaments comme le sémaglutide (Wegovy®) et le tirzépatide (Mounjaro®, Zepbound®) ouvrent de nouvelles perspectives dans la prise en charge de l’obésité. Ils permettent une perte de poids importante chez certaines personnes et représentent une vraie avancée dans ce domaine.
Mais ces traitements, aussi prometteurs soient-ils, ne suffisent pas à eux seuls. Ils ne s’attaquent pas aux causes profondes de l’obésité. Une approche personnalisée est nécessaire pour réduire le risque élevé d’échec thérapeutique.
Sans accompagnement spécialisé et centré sur la personne (et non pas sur le poids corporel uniquement) permettant des changements durables du mode de vie, leurs effets s’estompent souvent, et une reprise de poids est fréquente après l’arrêt du traitement.
Je le répète : ces traitements agissent surtout sur les symptômes, exactement comme avec un régime restrictif, la perte de poids se maintient tant que l’apport calorique reste réduit, notamment grâce à une diminution de l’appétit. Mais si les habitudes de vie ne changent pas en profondeur, l’arrêt du traitement conduit souvent à un retour aux anciennes habitudes et donc à une reprise de poids.
C’est pourquoi ces nouveaux médicaments doivent toujours être utilisés en complément d’un accompagnement personnalisé, axé sur les véritables causes de l’excès de poids, propres à chacune et chacun : habitudes alimentaires, activité physique, comportements face à la nourriture et bien-être psychologique.
L’outil central de cette démarche est ce qu’on appelle l’éducation thérapeutique du patient. Elle aide chaque personne à comprendre ses propres mécanismes, à reprendre confiance, et à mettre en place des solutions concrètes et adaptées à sa vie. Les bénéfices sont nombreux: amélioration de la santé globale, de la qualité de vie, et renforcement du sentiment de maîtrise de soi, en plus de la perte pondérale.
Les traitements médicamenteux actuellement disponibles sont prescrits par un spécialiste de l’obésité, en complément d’un suivi régulier. Leur prescription doit être encadrée (critères d’éligibilité, identification du bon moment d’initiation, suivi), dans une stratégie centrée sur la personne et non pas sur le poids uniquement.
Médicaments favorisant la perte de poids : ce qu’il faut savoir sur leur remboursement en Suisse
À ce jour, un seul médicament est remboursé par l’assurance de base en Suisse pour les adultes en situation d’obésité : le Wegovy® (sémaglutide).
Le Saxenda® (liraglutide), quant à lui, est réservé aux adolescents de 12 à 18 ans dans des situations bien précises.
Le Mounjaro® (tirzépatide), bien reconnu pour le traitement de l’obésité et du diabète de type 2, n’est actuellement pas pris en charge par l’assurance de base en Suisse, ni pour l’une ni pour l’autre de ces indications.
Concernant l’Ozempic®, bien qu’il contienne la même molécule que le Wegovy® (le sémaglutide), il n’est pas autorisé pour la perte de poids chez les personnes non diabétiques, quel que soit leur indice de masse corporelle. Son utilisation détournée à des fins amaigrissantes chez les patients non diabétiques entraîne des conséquences importantes: elle contribue à une pénurie pour les patients diabétiques qui en ont réellement besoin. En plus, elle bloque tout remboursement futur du Wegovy®. Autrement dit, si l’Ozempic® a été prescrit dans un but de perte de poids chez une personne non diabétique, l’assurance ne couvrira plus le coût du Wegovy®, qui restera alors entièrement à la charge de la personne en situation d’obésité.
Ajustement progressif de la dose : une étape clé du traitement
Le traitement par Wegovy®et de Mounjaro® doit se faire de manière progressive, en respectant des paliers. Chaque dose doit être maintenue pendant au moins 4 semaines avant de passer au niveau supérieur.
Il est important de savoir que certaines personnes en situation d’obésité ressentent déjà les effets bénéfiques du médicament à des doses inférieures ou égales à la dose maximales. Dans ce cas, il n’est pas nécessaire, ni recommandé, d’augmenter la dose davantage.
Avant chaque ajustement de dose, une discussion entre la personne et le spécialiste est essentielle. Il s’agit d’évaluer ensemble le bon équilibre entre les effets souhaités et les éventuels effets secondaires.
Enfin, un apprentissage pratique de l’utilisation du stylo injectable est indispensable avant la première injection, pour garantir une utilisation correcte et en toute sécurité.
En général, ces médicaments sont bien tolérés. L’effet secondaire le plus courant est la nausée surtout au début du traitement. D’autres troubles gastro-intestinaux tels que la constipation, le vomissement et la diarrhée sont moins fréquents. Bien que ces effets secondaires ne constituent pas un problème de santé grave, ils peuvent contribuer à la décision d’un patient d’arrêter le traitement.
Chirurgie de l’obésité : jamais un traitement de première intention
La chirurgie de l’obésité a commencé à se développer dans les années 1960. Aujourd’hui, elle représente le traitement offrant la plus grande perte de poids. Cependant, quelques éléments sont à considérer :
-
- La chirurgie ne traite pas les causes de l’obésité mais induit une perte de poids. N’oubliez pas la citation du Prof. Alain Golay: « le chirurgien ou la chirurgienne opère l’estomac et pas la tête ».
- L’obésité étant une maladie chronique, sa prise en charge nécessite un suivi interdisciplinaire et personnalisé durable, la seule intervention chirurgicale n’est pas suffisante et n’apporte pas de résultats sur le long terme.
- La chirurgie bariatrique peut entraîner une perte de poids importante, mais exige une préparation rigoureuse, des changements comportementaux profonds, et un suivi après l’opération à vie.
- Une préparation professionnelle avant l’opération ainsi qu’un accompagnement après l’opération et à vie sont indispensables, par des professionnels formés en obésité, pour éviter tout risque de reprise de poids et l’apparition des complications.